Pour le domaine de la Bouïssière, c’est de là que tout est parti bien sûr, dans cette grande combe qui se forme sous la barrière rocheuse des Dentelles sarrasines une fois passé le col du Cayron. Le vignoble de la Grande Bouïssière (c’est son nom) a été planté entre 1963 et 1966. La grande parcelle puis les terrasses. C’est un décor grandiose, mais quand on y travaille toute l’année on n’a pas forcément la même vision que les randonneurs.
Implanté sur des éboulis du Quaternaire, c’est un vrai vignoble de montagne, où l’entretien minutieux des banquettes en courbes de niveaux, maintenues par des talus buissonneux, évite l’érosion.
Gigondas
C’est un lieu assez austère, pentu (entre 300 et 500 mètres d’altitude), âpre, caillouteux et exposé nord-ouest. D’une manière générale, il y a moins de soleil que dans nos autres parcelles. Du 20 décembre à la fin janvier, il n’atteint même pas les vignes.
Les vins sont plus frais, plus ciselés, plus longs, plus racés, sur une belle trame de tanins serrés qui donne une sensation minérale. C’est ce que je ressens, une noble austérité.
Renforcée par ces parfums de garrigue que la pruine des raisins semble mystérieusement capter dans l’air ambiant.
Le géologue Georges Truc nous a aidés à comprendre la magie de ce terroir. En particulier comment la vigne, en plongeant ses racines dans les argiles du Valanginien enfouies sous les éboulis, s’ouvre « les portes des coffres alumino-silicatés, riches en oligo-éléments métalliques » et l’eau dont elle a le plus grand besoin.
Longtemps, j’ai eu l’impression de mener un combat contre les Dentelles. J’ai peu à peu appris à les « écouter ». Aujourd’hui je les perçois comme un partenaire.